par Pierre Tourvieille de Labrouhe – Cahier N°5
La clientèle
Conçu sur un standard de luxe, l’hôtel s’adresse aux débuts des années 30 à une clientèle plutôt aisée et désirant profiter de toutes les commodités de l’époque. Représentants de commerce, bourgeois, estivants fortunés, négociants, hommes politiques, etc… L’hôtel est le seul du canton à proposer un tel standing. Mr Magne, ancien marchand de toiles, se souvient qu’enfant, il venait admirer les voitures de ces gens de passage dont la Ford Vedette de Mr. Fonteix, marchand de toile parmi les plus prospères.
En effet, l’hôtel était le point de chute pour les négociants en toile. Les représentants d’usines de textiles du Nord ou des Vosges prenaient pension à Allanche afin de faire le tour des marchands/voyageurs.
On imagine, comme c’était le cas à Condat ou Riom es Montagne que des commandes de plusieurs milliers de francs y étaient passées, celles-ci étant prises pour l’année à venir.
Le « Syndicat des Négociants Voyageurs » y organisera d’ailleurs des réunions et banquets pouvant accueillir jusqu’à 100 personnes.
Hors l’activité estivale quotidienne, le Modern’Hôtel, (puis l’hôtel Bonnal) connaissait des pointes de fréquentation les jours de foire, tant dans les chambres qu’au café du rez de chaussée. Marchands d’Italie et de Navarre y prenaient une chambre pour le weekend.
Les veilles de foire, il n’était pas rare que le café resta ouvert. Négociations et palabres
pouvaient durer toute une nuit. On venait, une fois la transaction effectuée, sceller le contrat autour d’un «canon» ou d’une gentiane.
Jean Tronche, François Benoit, Pierre Bonnal , Albert Rollier et Jacques Eyrignac au comptoir dans les années 50/60
Mariage dans les années 30
Jean-Paul Belmondo
Années 50
Coté « people », c’est aussi l’Hôtel Bonnal qui accueillit le célèbre Jean Paul Belmondo durant les quelques étés qu’il passa avec ses parents en Auvergne. (Cf. article cahier des ADVA N°2) Suite à une primo-infection, il sera ensuite envoyé en convalescence et y résidera une année entière.
Autres invités de marque : les pompiers d’Allanche. La façade du Modern’Hôtel servit pendant de nombreuses années aux exercices et manoeuvres !
Un autre personnage, remis récemment sur le devant de la scène pour le centenaire de sa naissance, le Président Georges Pompidou fit plusieurs passages dans la cité allanchoise. Il y vint à plusieurs reprises en tant que Premier Ministre et candidat lors des campagne des élections législatives de 67 et 68, et séjourna ainsi au Modern’Hôtel tenu à l’époque par Pierre Bonnal. Ne souhaitant pas être coupé de Paris, il demanda à ce que soit installée une ligne directe avec Matignon afin d’être mis au courant des troubles qui se déroulaient dans la capitale en mai 68.
Georges Pompidou accompagné de Mr et Mme Bonnal, de MM. Jean Seguy et de Lucien Glaize – février 1967
Pour en savoir + : Extrait du Cahier N° 5, en rupture de stock 🙁
Bibliographies :
• Patricia Bayer, Intérieurs Art Deco, Thames & Hudson, 2000
• D.R.A.C Auvergne, Canton de Saignes. Cantal. (Images du Patrimoine n° 176)
• Alfred Durand, La vie rurale dans les Massifs volcaniques des Dores, du Cézallier, du Cantal et de l’Aubrac, Imprimerie Moderne Aurillac, 1946
• Joël Fouilheron, Le Cantal de Georges Pompidou – Quelques part sur terre…, 2011
• Travaux d’architecture 1929-1933 / Georges Breuil – Strasbourg : Ed. Edari
Remerciements à Mrs Jean-Bernard Béland et Pierre Kaiser pour l’iconographie et la documentation, à Mrs Philippe Glaize, Jacky Magne et Louis Soulier pour leurs souvenirs ainsi qu’à la famille Albaret pour leur accès au bâtiment et aux plans.
3 Commentaire(s)
Excellente étude de Pïerre Tourvieille , jeune architecte qui a fait un travail de recherche remarquable et fouillé sur cet immeuble Art Déco Cet élément important du patrimoine cantalien va retrouver son lustre d’antan grâce aux travaux de rénovation entrepris par Hautes Yerres Communauté , son nouveau propriétaire.
Philippe Glaize .
Bonjour et bravo pour votre étude !
J’ai vu l’hôtel il y a quelques années, il était encore « dans son jus » des années 1930… aujourd’hui sa « rénovation » en a fait une verrue jaune poussin au milieu de la ville ! Quel dommage que les fonds publics ne soient pas l’occasion de faire une restauration en respectant les règles de l’art : enduit lissé à la chaux, pas de baguette d’angle en PVC, mise en valeur intérieure (là on a du carrelage 1er prix et des faux plafond de bureaux standards)… Maintenant il ressemble à un HLM de mauvais goût.
Je suis heureux que ce bâtiment ait pu être maintenu et trouver une seconde vie mais vraiment attristé par la façon dont il a été traité…
Julien Del, architecte
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